Froidement abattus... par un lieutenant de louveterie, sur ordre du Préfet du Finistère (29). C'est le triste sort subi par Obélix et Nestor, deux sangliers secourus et élevés par Brigitte Lavoine, à peine deux jours après son décès. Pourtant, dès la découverte du corps de la retraitée dans sa maison à Bolazec (Finistère), plusieurs associations de protection animale s'étaient portées volontaires pour recueillir ses compagnons de vie. Ses huit chats, dix chiens et deux cochons asiatiques, tous issus de sauvetages, ont été placés en refuges et familles d'accueil. Les deux sangliers eux-mêmes s'apprêtaient à rejoindre un sanctuaire...
Brigitte Lavoine avait témoigné sur le sauvetage d'Obélix dans l'émission 30 Millions d'Amis. Retrouvez l'intégralité du reportage ici.
Un abattage cruel... exécuté sur ordre de la préfecture
Mais alors qu'elles s'affairaient à recueillir les deux porcins, les membres de l'Association Les Mistoufles furent saisies par une vision d'horreur : « Les deux sangliers étaient introuvables. Il y avait une flaque de sang près du hangar, confie à 30millionsdamis.fr une employée de l'association. A l'intérieur, il ne restait que les deux cochons ». Et pour cause, les deux sangliers ont été sèchement abattus... sur décision préfectorale. « Un sanglier était en mauvaise santé, se déplaçait difficilement ; les services vétérinaires ont décidé la mise à mort de l'animal, explique au média Le Télégramme la préfecture, impassible. Le deuxième sanglier, détenu illégalement, présentait des risques : statut nuisible de l'espèce dans le Finistère, risque de peste porcine. De plus, son contact prolongé avec l'espèce humaine empêchait sa remise en liberté et la période de confinement ne permettait d'envisager aucune autre solution ».
Quid, alors, de leur placement en sanctuaire, rendu possible grâce à la mobilisation des associations ?! Contrairement aux affirmations de la préfecture, une alternative était bien prévue ; or, l'article R. 655-1 du code pénal interdit le fait, « sans nécessité », de donner volontairement la mort d'un animal domestique ou apprivoisé ou tenu en captivité. « Et quand bien même il y aurait un problème de régularité administrative sur un animal, cela n'induit en aucun cas son abattage, fustige l'avocat spécialisé dans la faune sauvage qui défendait Brigitte. Il faudra que les responsables rendent des comptes ».
Une complicité unique entre Brigitte et ses protégés
Ils sont ma raison de vivre, mes compagnons, mes amis.
Brigitte Lavoine
Un abattage controversé et incroyablement cruel : tous deux rescapés, les deux suidés étaient pour Brigitte Lavoine, « ses bébés » comme elle aimait les appeler. Nestor avait été sauvé en 2017, après que Brigitte l'ait découvert âgé de 5 mois, blessé, probablement heurté par une voiture. Obélix, orphelin de mère tuée par des chasseurs, était choyé par Brigitte depuis 15 ans, elle qui l'a recueilli alors qu'il avait encore son cordon ombilical. « Je suis la seule maman qu'il n'ait jamais connu. Dans son esprit, je suis sa mère et j'en ai l'autorité. Lorsque je le dispute, il réagit comme lorsqu'une maman gronde son enfant ! », plaisantait-t-elle auprès de 30 Millions d'Amis, en 2009. Dès son arrivée dans son nouveau foyer, le sanglier avait aisément été adopté par les autres protégés de Brigitte : « Il est important pour lui qu'il ait une vie sociale ; le sanglier n'est pas un animal solitaire, confiait-elle. Il est donc essentiel qu'il vive auprès d'une famille, qu'elle soit composée d'humains ou d'animaux ».
Ces dernières années, la militante publiait régulièrement sur les réseaux sociaux des images de ses animaux, accompagnées de textes à la fois drôles et émouvants. Nestor et Obélix se montrent complices et coquins, dérobant la couverture de leur mère d'adoption, assoupis le museau dans leur gamelle ou endormis près de la cheminée. « Ils font dodo comme des bienheureux, être innocents qu'ils sont, bien protégés par leur maman, légendait Brigitte en décembre 2019. Ce que je partage aux eux sont des moments merveilleux. Je profite au maximum de mes loulous, chiens, chats, sangliers et petits cochons. Ils sont ma raison de vivre, mes compagnons, mes amis ».
La cruauté froide de certains Hommes et certaines administrations
Je pense à elle et, franchement, j’ai envie de chialer.
Hugo Clément sur Twitter
Depuis le drame, les hommages oscillent entre tristesse et stupeur. Julie Honiat, une amie proche de Brigitte, exprime sa colère devant tant de barbarie, mais aussi, son chagrin face à la disparition d'une dame courageuse et engagée : « Je suis encore sous le choc après ce cruel abattage. Brigitte s'est battue toute sa vie pour sauver les animaux. Elle mérite beaucoup de reconnaissance », confie-t-elle à 30millionsdamis.fr. De son côté, le journaliste Hugo Clément a très vivement réagi sur Twitter, fustigeant « les autorités [qui] n’ont pas laissé le temps d’envisager une issue heureuse pour ces deux animaux que Brigitte aimait profondément », rendant un hommage appuyé à cette femme généreuse : « Je pense à elle et à ce qu’elle aurait souhaité pour ses deux protégés. Je pense à elle et à la cruauté froide dont peuvent faire preuve certains Hommes et certaines administrations. Je pense à elle et, franchement, j’ai envie de chialer ». Et pour tout dire, nous aussi !